Crise sanitaire : bouleversement des médias

La crise sanitaire à bouleverser les médias. D’après une étude annuelle menée par Le Reuters Institute for the Study of Journalism et YouGov (société internationale de sondages et d’étude de marché basée sur Internet) auprès de plus de 92 000 consommateurs d’informations en ligne sur 46 marchés.

Une confiance en hausse entre les médias et public… Mais qui a encore du chemin à faire

D’après cette étude, la crise sanitaire a conduit les médias à placer la « recherche d’information fiable » parmi ses premières préoccupations, ce qui a engendré une amélioration de la confiance accordée aux médias par les sondés partout dans le monde.

44 % des personnes interrogées affirment faire confiance aux médias la majorité du temps, soit six points de plus que l’année dernière. Avec un taux de confiance de 29 %, les États-Unis sont à présent le pays où ce niveau est le plus faible. La France se voit accorder le même niveau de défiance : seulement 30 % de sondés accordent leur confiance aux médias. Néanmoins, on peut souligner que cette proportion a augmenté de neuf points cette année. Parmi l’ensemble des médias, les journaux locaux et régionaux français sont considérés comme les plus fiables.

En Europe occidentale, les médias en qui la population a le plus confiance sont les médias du service public, qui représentent l’impartialité ainsi que la prudence.

La crise sanitaire a créé un fossé entre la confiance accordée aux médias, et celle accordée aux actualités sur les réseaux sociaux.  C’est sur les réseaux sociaux que les sondés ont vu le plus de « fake news » concernant le Covid-19.  La désinformation occupe les pensées de 58% des personnes interrogées, ce qui représente deux points de plus qu’en 2020. Le biais de cette désinformation est variée en fonction des pays. Dans les pays du Sud, ce sont les services de messagerie très populaires, comme Whatsapp,  que redoutent le plus la population. Tandis que dans les pays occidentaux, l’inquiétude se porte plutôt sur les réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter.

Avec le Covid-19, la presse papier toujours plus en difficulté

La crise sanitaire a intensifié la pression sur la presse papier. En effet, le Reuters Institute évoque une difficulté de plus pour ce secteur en raison des restrictions de circulation pour les lecteurs et de la baisse des revenus issus de la publicité.  Partout dans le monde, des médias ont fermé, des publications ont été arrêtées. En revanche, la presse numérique s’est développée à vitesse grand V. Le rapport montre une « hausse significative des paiements » dans certains pays occidentaux.  Mais peu de personnes restent prêtes à payer pour des informations en ligne, autour de 17 % dans une vingtaine de pays où ces modèles se développent.

En France, ce chiffre ne dépasse pas les 11 %. Mais le changement est là car plusieurs publications affirment une augmentation du nombre d’abonnés numériques, notamment chez Le Monde, Le Figaro ou Mediapart. Cela ne compense pas les pertes de la presse papier, mais montre un réel changement dans le mode d’achats du consommateur, selon le Reuters Institute.

Le média doit-t-il être impartial ?

Cette année la majorité des sondés valorise l’objectivité de leurs sources d’informations. Néanmoins, les jeunes semblent y être les moins attachés : 31 % des moins de 35 ans considèrent que sur certains sujets, les médias ne devraient pas essayer d’être neutres, alors que leurs ainés, les plus de 35 ans, ne sont que 22 % à partager cet avis. Le sondage définit que c’est « en particulier le cas au sujet de certaines questions brûlantes de justice sociale ». Les jeunes ne trouvent également pas judicieux de donner un temps de parole équivalent à tous. Dans une grande partie de l’Europe occidentale, les 18-24 ans sont la classe d’âge qui juge sa représentation dans les médias la moins juste, en particulier les jeunes femmes. Ils reprochent un manque de couverture médiatique des sujets qui leur tiennent à cœur.

De plus, en comparant une sélection de pays sur plusieurs continents, les chercheurs ont constaté que « la plupart des groupes politiquement partisans pensent que leurs opinions politiques sont, dans l’ensemble, couvertes de manière injuste ». C’est davantage le cas pour les personnes de droite. D’après une étude aux Etats-Unis, 75 % des sondés qui se disent de droite affirment ainsi la couverture médiatique de leurs opinions inéquitables,  alors qu’ils ne sont que 34 % à gauche. Par ailleurs, aux États-Unis toujours, les minorités raciales considèrent aussi être moins bien représentées. Le rapport soulève ainsi la question du manque de diversité dans les rédactions, cela peut expliquer certains de ces résultats.

Les journalistes et les médias en concurrence avec les réseaux sociaux 

Parmi douze pays étudiés (Royaume-Uni, États-Unis, Allemagne, France, Espagne, Italie, Irlande, Danemark, Finlande, Japon, Australie et Brésil), 66 % des personnes interrogées utilisent les réseaux sociaux pour lire , partager ou commenter les actualités du pays ou du monde – et ce malgré la défiance vis à vis des fakenews évoquée plus haut… Whatsapp, Telegram, TikTok et Instagram gagnent en puissance dans le domaine de l’information tandis que Facebook, qui reste le leader, perd en popularité. Lorsque les internautes consomment de l’information sur Facebook ou Twitter, ils sont nombreux à suivre les médias traditionnels et les journalistes présents sur la plateforme. Contrairement à Snapchat, Instagram et TikTok, où les journalistes « jouent les seconds rôles ». Les jeunes se tournent davantage vers les « personnalités » (célébrités, influenceurs, etc.) y compris en ce qui concerne l’actualité, sur des sujets importants comme le réchauffement climatique ou les inégalités.

Les médias locaux délaissés pour certains sujets 

Les personnes interrogées font confiance aux journaux et médias locaux quand il s’agit de politique locale ou encore de faits-divers.  Mais le Reuters Institute partage que d’autres sites internet ou les réseaux sociaux « sont considérés comme meilleurs pour un éventail d’informations locales, pour ce qui est de la météo, le logement, l’emploi et les “choses à faire”, qui faisaient autrefois partie des informations regroupées par les médias locaux ». Toutefois, les médias locaux restent considérés comme les plus fiables en ce qui concerne le Covid-19, même si la moitié des sondés passe tout de même par d’autres sites pour se renseigner.

Sources :

  • https://reutersinstitute.politics.ox.ac.uk/digital-news-report/2021
  • https://larevuedesmedias.ina.fr/tendances-consommation-medias-rapport-reuters-2021-covid-confiance-desinformation-modele-economique-jeunes-presse-locale